mardi 20 janvier 2015

Le « micmac » de la TVA en EHPAD

L’assujettissement d’un EHPAD fait souvent l’objet de débat notamment pour le secteur public qui souhaiterait parfois y être soumis. La question de l’application de la TVA refait donc surface de manière régulière.

De quelle manière les EHPAD sont-ils assujettis à la TVA ?

La tarification en EHPAD distingue selon trois tarifs différents : le tarif hébergement, le tarif dépendance, et le tarif soin. L’application de la TVA varie pour ces trois tarifs et en fonction de la nature de l’établissement concerné.

Ainsi, s’il s’agit d’un EHPAD privé à but lucratif :

-          Le tarif soins est exonéré de la TVA (Article 261, 4, 1° ter du CGI) ;
-          Le tarif de hébergement est soumis à un taux de TVA réduit ;
-          Le tarif dépendance est soumis à un taux de TVA réduit.

L’établissement peut récupérer la TVA sur les dépenses d’investissement et de fonctionnement en matière de dépendance et d'ébergement.

Le contentieux fiscal sur l’application de la TVA est particulièrement abondant. Deux arrêts récents ont permis de préciser les choses.

Tout d’abord, l’arrêt de la CJUE du 27 mars 2014, SARL Le Rayon d’Or, C-151/13, est venu préciser le droit à déduction de la TVA pour les EHPAD privés. Une SARL gérante d’un EHPAD estimait que les sommes reçues au titre du forfait de soins ne relevaient pas du champ d’application de la TVA et qu’elles ne devaient donc pas s’imputer sur le droit à déduction de la TVA.

L’EHPAD estimait que le forfait soins ne pouvait pas être mis en relation avec les soins effectivement réalisés dans l’établissement. Le forfait de soins ne serait donc pas la contrepartie de prestations à titre onéreux.

La CJUE n’a pas suivi la SARL sur ce point et affirme que la somme perçue au titre du forfait soins est bien la contrepartie des prestations de soins réalisées au sein de l’établissement et relève donc du champ d’application de la TVA. Il en résulte à ce titre une exonération de TVA qui doit être intégrée dans le calcul du dénominateur du droit à déduction de la TVA de l’établissement.

La situation pour les EHPAD publics est moins complexe dans l’ensemble puisqu’ils ne sont pas soumis à la TVA ou ne peuvent la récupérer.

Néanmoins, la question de l’assujettissement des EHPAD publics à la TVA ressurgie de manière récurrente. Les questions parlementaires demandant des précisions sur l’application de la TVA aux EHPAD publics sont nombreuses. Un amendement au PFLSS de 2015 demandant la rédaction d’un rapport sur la fiscalité applicable aux EHPAD publics avait d’ailleurs été déposé par un député et adopté par l’Assemblée Nationale en octobre 2014. Toutefois, le sénat a demandé la suppression de cet amendement et de l’article 53 Bis afin de ne pas retarder la prise de décision alors même que des travaux sur la tarification en EHPAD ont été lancés.

Pourquoi les EHPAD publics souhaitent-ils se voir appliquer la TVA ?

Certains EHPAD publics sont de droit soumis à la TVA en vertu des règles de la concurrence. Toutefois, d’autres EHPAD publics souhaitent être soumis à la TVA, notamment en cas d’investissement à venir.

Nombreux sont les cabinets de conseils qui préconisent aux EHPAD publics de choisir l’assujettissement à la TVA. Cet assujettissement leur permettrait de réaliser des bénéfices important et de réaliser des investissements. Il faut ici préconiser la prudence vis-à-vis de ces allégations qui semblent très souvent exagérées. En effet, si l’assujettissement à la TVA pour un EHPAD public peut avoir un avantage, les inconvénients sont nombreux :

-          Risque d’exclusion d’un groupement de coopération : l’assujettissement à la TVA d’un établissement du groupement présente le risque de voir l’ensemble du groupement assujetti à la TVA. Les groupements seront donc peu enclins à garder ou à faire entrer ce genre d’établissement ;
-          Perte du bénéfice du taux réduit de TVA pour les opérations d’investissements (dispositif de livraison à soi-même d’immeuble (article 257-7° du CGI) ;
-          Impact éventuel sur le financement public apporté aux établissements.


La prise en compte de ses risques est indispensable pour prendre une décision éclairée en matière de TVA. La prise de conseils auprès de la DGFIP est par ailleurs hautement recommandée avant de choisir l’assujettissement à la TVA.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS

L’accès aux données de santé : « régulé » ou « étranglé » ?

Le projet de loi de santé de la ministre des affaires sociales, de la santé et des femmes a définitivement du mal à passer.

Outre la colère des médecins vis-à-vis du tiers payant généralisé, le projet de loi de santé suscite l’inquiétude de l’institut des données de santé. Cet organisme est chargé de veiller à la qualité des systèmes d’informations et ainsi que de la mise à disposition de ces données à ses membres.

L’institut des données de santé (IDS) a publié le 7 janvier 2015 son rapport annuel d’activité pour l’année 2014. Dans ce rapport, l’IDS s’inquiète que le projet de loi de santé « s’éloigne sensiblement de certaines préconisations de la commission open data en santé ». Cette dernière avait fait plusieurs propositions dans son rapport remis au gouvernement le 9 juillet 2014. L’avant projet de loi, avant d’être soumis au Conseil d’Etat, avait alors subi des modifications de la part du gouvernement. Il a encore été remanié avant d’être présenté en conseil des ministres en octobre 2014.

Données de santé : vers une ouverture ?

L’ouverture des données de santé s’avère essentielle pour tout un ensemble d’acteurs aussi bien publics que privés. Aujourd’hui, demander l’accès aux données de santé c’est un peu le parcours du combattant. Il faut être armé de patience pour gagner la bataille et bénéficier de l’autorisation d’accès.

Et cela risque d’être pire encore demain. Ainsi, le projet de loi de santé prévoit d’introduire un Système National des Données de Santé (SNDS) qui centraliserait le PMSI et le SNIIRAM, deux des plus grosses bases de données en santé. Toutefois, les conditions d’accès à ce système de données seront draconiennes afin de préserver l’accès à un nombre trop important de données. Ces systèmes contiennent effectivement des données anonymisées mais qui présentent un fort risque de ré-identification.

Autrement dit, si la centralisation apporte un avantage technique, elle perd tout intérêt pour ceux à qui l’accès sera dorénavant fermé alors même qu’ils pouvaient travailler auparavant sur le PMSI (toujours avec une autorisation, bien entendu). Pour l’IDS, la création de ce fichier va non seulement maintenir le verrouillage du SNIIRAM, mais également paralyser l’accès au PMSI, notamment pour les personnes privées à but lucratif.

La question qui doit alors se poser est-celle de savoir si la création d’un fichier aussi gros est véritablement nécessaire ?

Le Député Gérard BAPT a organisé un colloque le 15 décembre dernier à l’Assemblée nationale autour de ce sujet.

La plupart des acteurs présents sont apparus inquiets du risque posé par la création d’un tel fichier.

Mais plus encore c’est l’absence de réelles évolutions sur l’accès aux données de santé dans le projet de loi qui agite les acteurs du secteur.


L’Assemblée Nationale risque d’être le terrain d’affrontements assez houleux autour du projet de loi de santé. Nous ne manquerons donc pas d’informer nos lecteurs des débats parlementaires et des évolutions qui en découleraient.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS

mercredi 14 janvier 2015

LA COOPERATION AU-DELA DU RUBICON ... ?

Delphine JAAFAR, Avocat associé du Cabinet BISMUTH AVOCATS, en charge du département SANTE, PHARMACIE et BIOTECHNOLOGIES, a animé une journée consacrée aux outils juridique en matière de coopératin sanitaire, sociale et médico-sociale à l'EHESP ce mercredi 7 janvier 2015:

- Une pêche commune dans les eaux du RUBICON: les outils de coopération dans le sanitaire et le médico-social
coopération conventionnelle (dont les CHT), coopération organique (association, GIE, GIP)

- Des courants et des contre-courants dans les eaux du RUBICON: GCS et GCSMS, convergences et divergences
une nage en eaux troubles dans le RUBICON: la "sanitarisation" des outils de coopération
la coopération perdue au fond du RUBICON ?

PETIT DEJEUNER DEBAT ORGANISE PAR LE CABINET BISMUTH DANS SES NOUVEAUX LOCAUX PARISIENS SUR LE PROJET DE LOI DE SANTE

Le CABINET BISMUTH a organisé le 13 janvier 2015 matin un petit déjeuner dans ses nouveaux locaux parisiens (7 rue de Madrid, 75 008 PARIS) en présence d’acteurs du monde de la santé (public/ privé / usagers) consacré au projet de loi de santé : 

SUCRE OU SANS SUCRE
Projet de loi de santé
Réflexions et perspectives : quels changements pour les acteurs et professionnels de santé ?

Un focus particulier a été réalisé sur le Titre II de la loi relatif à l’amélioration des parcours de santé, à la problématique de l’OPEN DATA et enfin aux innovations dites majeures du projet de loi.

De riches débats pour un projet de loi qui laisse cependant de nombreuses interrogations quant aux objectifs poursuivis et à sa mise en œuvre opérationnelle ...

Retrouvez le diaporama des interventions sur le site du Cabinet BISMUTH AVOCATS: www.bismuth.fr


Delphine JAAFAR

BISMUTH AVOCATS

L'uniformisation progressive des prescriptions médicales en EUROPE

Le Parlement européen et le Conseil ont une volonté frénétique d’unifier le droit applicable aux Etats membres. Le droit de la santé n’échappe pas à cette envie furieuse et c’est même une matière ou les pouvoirs publics s’en donnent à cœur joie.

En France, la transposition en droit interne des directives de l’Union Européenne ne fait pas toujours l’objet d’un enthousiasme débordant. Le gouvernement est plutôt enclin à faire trainer les choses en transposant les textes au dernier moment.

Ainsi, deux directives datant du 9 mars 2011 (Directive 2011/24/UE) et du 20 décembre 2012 (Directive 2012/52/UE) ont harmonisé la législation applicable aux prescriptions médicales. L’objectif était de favoriser la reconnaissance des prescriptions médicales établies sur le territoire de l’Union européenne. Le droit français a transposé ces directives par une loi n° 2014-201 datant du 24 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé.

Dès lors, le travailleur allemand qui se fait prescrire du Xanax par un médecin Roumain en Italie peut aller chercher son médicament dans une pharmacie française.

Une telle harmonisation peut sembler superflu, mais les difficultés liées à l’obtention de prescriptions faites dans un autre Etat membre sont réelles et peuvent avoir des conséquences importantes.

Le décret du 17 décembre 2014, relatif à la reconnaissance des prescriptions de dispositifs médicaux établies dans un autre Etat membre de l’Union européenne apporte des précisions quant à la reconnaissance des prescriptions de dispositifs médicaux.

Les dispositifs médicaux sont définis comme un instrument, appareil, équipement ou encore un logiciel destiné, par son fabricant, à être utilisé chez l’homme à des fins, notamment, de diagnostic, de prévention, de contrôle, de traitement, d’atténuation d’une maladie ou d’une blessure.

Autrement dit, les dispositifs médicaux sont très nombreux et ils sont utilisés chaque jour pour prévenir ou soigner la maladie.

Ce décret modifie les articles R5211-70 et R5211-71 du Code de la santé publique. Désormais, lorsque les prescriptions médicales respectent les mentions obligatoires prévues à l’article R5211-70, les personnes habilitées à délivrer les dispositifs médicaux ne peuvent refuser de délivrer ces produits, sauf en cas de doutes légitimes et justifiés.

Voilà que s’ouvre un peu plus le marché des dispositifs médicaux en Europe alors même que la France et l’ANSM entendent modifier le régime applicable aux dispositifs médicaux.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS


Le virage ambulatoire: seule manière d'éviter de se prendre le mur ?

« Le deuxième axe est le virage ambulatoire qui sera opéré dans les établissements hospitaliers ».

La Loi de finance de la sécurité sociale pour 2015 adoptée le 22 décembre 2014 pour 2015 de multiplier le recours aux solutions ambulatoires.

C’est ainsi que dans le II de l’annexe B présentant un RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES, PAR BRANCHE, DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DU RÉGIME GÉNÉRAL DE SÉCURITÉ SOCIALE, LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET DE DÉPENSES DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DE CES RÉGIMES AINSI QUE L'OBJECTIF NATIONAL DE DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE POUR LES QUATRE ANNÉES À VENIR, la loi annonce « une transformation fondamentale du fonctionnement du système hospitalier ».

Que faut-il penser de ce virage déjà annoncé dans le projet préparant la loi de finance ?

Le développement de la médecine ambulatoire n’est pas une volonté nouvelle du gouvernement. Ainsi, plusieurs rapports mettant en exergue les nombreux avantages apporter par ce mode de prise en charge, ont été publiés ces dernières années, voir ces derniers mois.

Ces rapports montrent pour la plupart que le recours à la médecine et à la chirurgie ambulatoire est insuffisant en France. Par exemple, un rapport de la HAS et de l’ANAP intitulé « ensemble pour le développement de la chirurgie ambulatoire » (titre un brin racoleur tout de même) indique que seulement 4 opérations chirurgicales sur 10 sont effectuées en ambulatoire contre 8 sur 10 aux Etats-Unis.

Marisole Touraine, Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes est largement favorable au développement de la médecine et de la chirurgie ambulatoire. Elle fixe une objectif de 50% des opérations réalisées en ambulatoire dès 2016.

Pourquoi cet engouement frénétique pour la chirurgie et la médecine ambulatoire ?

L’atout majeur de la chirurgie ambulatoire n’est pas d’améliorer les soins apportés au malade mais bien de réduire les dépenses de santé et de rendre plus efficace la dépense hospitalière. En effet, le principe de la chirurgie ambulatoire est de réduire la présence du patient à l’hôpital et ainsi de réduire les coûts liés à son hébergement et à sa surveillance postopératoire. Plusieurs dizaines de millions d’euros pourraient ainsi être économisés par le secteur hospitalier.

Néanmoins, le recours massif à la chirurgie ambulatoire présente un risque : celui de voir des services hospitaliers désorganisés par des exigences et un suivi nouveau.

Le développement ambulatoire ne saurait se faire sans que soit préalablement mis en place les outils nécessaires pour gérer le flux de patients fraîchement débarqués des salles d’opération.

Et ce n’est pas les secrétaires administratifs que sont en train de devenir les médecins généralistes qui pourront assurer une telle charge de travail. C’est pourquoi la loi entend instaurer un contrat de praticien territorial de médecine ambulatoire.

Reste à voir dans quelles conditions ce médecin libéral pourra assurer sa nouvelle mission.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS


Un lancement retardé pour la facturation individuelle

L’article L.162-22-6 du Code de la sécurité sociale prévoit qu’un décret en Conseil d’Etat fixe les catégories de prestations qui sont soumises à la facturation individuelle.

Ce décret vient d’être publié au JORF le 3 janvier 2015. Il détermine les modalités de généralisation de la facturation individuelle applicable aux établissements publics et privés de santé mentionnés aux a, b et c de l’article L.162-22-6.

La facturation individuelle des établissements de santé (FIDES) est un projet destiné à instaurer progressive la facturation individuelle au sein de l’ensemble des établissements de santé public et privé à but non lucratif. Ce projet, initié en 2010, à fait l’objet d’une longue expérimentation afin d’évaluer les avantages d’une telle facturation et les conditions dans lesquelles une généralisation pourrait intervenir.

En pratique, la facturation individuelle permet aux établissements concernés d’adresser directement une facture à l’assurance maladie pour chaque épisode de soins.

Les objectifs du FIDES sont clairs :

-          Meilleure maîtrise des dépenses de santé;
-   Informer l’Etat sur les données individuelles des établissements afin d’en améliorer le fonctionnement et la gestion;
-          Remboursement plus rapide des assurés sociaux.

En 2013, le calendrier prévoyait la généralisation progressive du FIDES jusqu’à son terme en 2016. Ce décret marque le point de départ de cette généralisation du financement et prend actes des expérimentations réalisées dans les établissements.

Il fixe les modalités de généralisation de la facturation des établissements de santé, ainsi que les conditions dans lesquels ils doivent traiter les données personnelles de santé.

L’entrée en vigueur de ce décret est retardé jusqu’au 1er mars 2016 mais il permet d’apprécier la teneur des obligations qui pèseront sur les établissements de santé.

La généralisation de la FIDES nécessite des investissements important de la part des établissements concernés. En effet, ils doivent disposer d’une solution de dématérialisation pour la facturation ce qui entraine des coûts de formation important du personnel.

La mise en place d’un comité de pilotage réunissant les acteurs des différents services en lien avec la facturation apparait indispensable afin de réaliser une transition optimale vers la facturation individuelle.


Ce n’est donc pas aujourd’hui encore que la facturation des établissements sera unifiée.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS

Le GHT: une CHT bis ?

Le Groupement hospitalier de territoire (GHT) est le nouveau vaisseau amiral créé par le gouvernement afin de réaliser une véritable coopération hospitalière efficace et dynamique. Intégré dans le projet de loi de santé de Madame la Ministre Marisol Touraine, le GHT vise à « ancrer l’hôpital dans son territoire » et à « renforcer le dispositif de coopération hospitalière ». Toutefois, ce navire amiral semble déjà avoir du plomb dans l’aile tant les critiques et les interrogations sur son mode de fonctionnement sont nombreuses.

Cet outil est destiné à remplacer les Communautés Hospitalières de Territoire (CHT) créées par la loi HPST du 21 juillet 2009 qui ont-elles aussi souffert les critiques des professionnels de santé. Trop lourde, trop complexe à mettre en œuvre et pour des résultats insuffisants. Le GHT devra donc être capable de corriger ces travers tout en restant efficace.

Pour ce faire, le projet de loi envisage plusieurs innovations destinées à faire évoluer la coopération hospitalière.

L’adhésion au GHT sera obligatoire pour tous les établissements publics de santé d’ici le 1er janvier 2016. Il s’agit là d’un calendrier très ambitieux qui apparait difficilement tenable, la loi n’étant encore qu’au stade du projet.
Selon le député Jean Leonetti, instaurer une telle obligation d’adhésion aux établissements de santé est indispensable pour permettre à « notre système hospitalier de se recomposer rapidement et de passer outre les inévitables réticences locales ». C’est donc à fin de redynamiser et de renforcer la coopération hospitalière que l’adhésion aux GHT est rendue obligatoire.
Il existera des dérogations fondées sur la spécificité de l’établissement lui permettant ainsi de ne pas adhérer à ce groupement. Toutefois, pour ceux qui refuseraient d’y adhérer, ils se verraient privés de dotations de financement de l’aide à la contractualisation. Cela aurait nécessairement un impact sur le fonctionnement des établissements.

Le projet de loi prévoit également d’ouvrir la coopération aux établissements et services médico-sociaux publics. Les établissements privés de santé pourront également intégrer le groupement en tant que partenaire.
L’objectif est donc clair : il faut ouvrir la coopération afin de simplifier et d’optimiser le parcours de soin du patient. Toutefois, rien ne précise les avantages et inconvénients d’un tel partenariat pour les établissements médico-sociaux et privés. Au regard des différences de fonctionnements de toutes ces entités, l’unification sous un même groupement semble peu réalisable. Pourtant, les expériences réussies de coopération entre ces différents types d’établissements prouvent qu’une collaboration est possible, voir indispensable pour assurer une stratégie médicale commune.

Le renforcement de la coopération entre établissement suppose de diminuer les coûts liés à l’exploitation des établissements. C’est pourquoi, le groupement devra charger un établissement de remplir les fonctions supports pour tout le GHT. Ce dernier devra gérer le système d’information hospitalier et le département de l’information médicale unique pour l’ensemble du groupement, la politique d’achats, la coordination de la formation. Ainsi, la coopération « forcée » pourrait se traduire par une réduction des frais fixes de fonctionnement et permettent d’économiser notamment en mutualisant les services et en globalisant les achats des établissements au niveau du groupe.

Toutefois cela suppose une entente et une organisation parfaite de tous les membres du GHT. Une telle concertation entre les établissements du groupe apparait toutefois compromise lorsqu’aucune gouvernance n’est prévue par le projet de loi. En effet, il est laissé aux établissements le soin d’organiser le fonctionnement du groupement. De plus, s’il est précisé que les GHT n’ont pas la personnalité morale, le projet de loi n’indique pas quelle sera la place des  membres du GHT. En effet, si l’article L 6132-1 –I révèle bien que le GHT ne bénéficiera pas de la personnalité morale, cela interroge sur la nature de cette entité juridique.

Est-ce une autre forme de coopération conventionnelle telle que le prévoyait la CHT ou une forme « sui generis » qui s’imposerait aux établissements ?

Les inquiétudes qui entourent le projet des GHT sont nombreuses, notamment au regard du délai très court qui est imposé par le projet de loi.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS