lundi 6 juillet 2015

Intervention CGPEM RHONE-ALPES: les enjeux de la E SANTE ....

Delphine JAAFAR est intervenue le 29 juin 2015 au sein de la commission santé de la CGPME RHONE-ALPES, consacrée aux enjeux de la E SANTE, aux côté de Monsieur Hubert VIOT qui a pu présenter la solution MAELA en cours de développement.




Le Cabinet BISMUTH est de plus en plus présent auprès des start-up proposant des démarches innovantes en matières de e santé ...





La politique générale de sécurité des systèmes d'information de santé ...



L’ASIP Santé a dernièrement publié trois documents constitutifs du corpus documentaire de  la Politique Générale de Sécurité des Systèmes d’Information de Santé.

L’élaboration d’une Politique Générale de Sécurité des Systèmes d’Information de Santé est une conséquence à la fois de l’augmentation de l’usage des technologies et de l’augmentation des risques et menaces pour les systèmes d’information de santé. Ainsi, avec cette Politique Générale de Sécurité des Systèmes d’Information de Santé, l’Etat souhaite fixer un cadre de sécurisation des systèmes d’information de santé pour accompagner la dématérialisation des données de santé entre autres.

D’un point de vue réglementaire, la protection des données personnelles de santé est primordiale. Cependant, pour espérer une bonne protection de ces données, le contrôle devra se faire tout au long du traitement du patient en  sensibilisant le personnel, en informant l’usager, en limitant l’accès aux données… Pour optimiser le contrôle durant le traitement, la protection des données doit également se faire par des contrôles a priori et a posteriori.

La protection des données personnelles de santé a pour base normative la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ainsi que son décret d’application du 20 octobre 2005. De ces textes ressort cinq principes fondamentaux :
  • la finalité du traitement : celle-ci doit être déterminée, explicite et légitime ;
  • la pertinence et la proportionnalité des données : celles-ci doivent être pertinentes par rapport à la finalité poursuivie ;
  • la conservation limitée des données : celles-ci doivent être conservées seulement la durée nécessaire à la réalisation de la finalité poursuivie ;
  • la sécurité et la confidentialité des données : veiller à ce que les données ne soient pas déformées, endommagées ou qu’un tiers non autorisé ne puisse y avoir accès ;
  • le respect des droits des personnes.
    Ces principes sont fondamentaux et ont inspiré la rédaction de cette politique.
     
     
    D’abord, le contrôle optimal de la protection des données personnelles de santé passe par un contrôle a priori. Ce contrôle se fait par la CNIL. Il s’agit en réalité d’une procédure préalable nécessaire pour les systèmes d’information de santé. Ce contrôle peut se faire de deux façons : soit par déclaration soit par autorisation. Par exemple, pour la mise en place d’une nouvelle fonctionnalité, celle-ci doit être analysée pour déterminer si elle nécessite une modification de la déclaration ou de la demande d’autorisation de la structure. De plus, ce contrôle a priori s’étend en réalité car la déclaration ou la demande d’autorisation doit être régulièrement revue pour vérifier qu’elle décrit correctement les traitements de données.  
    Ce contrôle a priori permet d’amoindrir les risques d’erreurs dans les systèmes d’information de santé et donc par conséquent il réduit également les menaces contre les données personnelles de santé. L’optimisation du contrôle passe en plus par la vérification régulière de la déclaration ou de la demande d’autorisation. Avec ce contrôle, la CNIL a un rôle de « filtrage » des systèmes d’information de santé.
     
    Ensuite, le contrôle se fait le temps de la réalisation de la finalité poursuivie. Cependant ce contrôle est différent en s’appuyant sur les premiers concernés c’est-à-dire les patients et le personnel de santé. En effet, ce contrôle n’en est pas vraiment un, il s’agit plus d’une collaboration avec les patients et le personnel de santé car en les informant des risques ils acquièrent une certaine responsabilité dans la protection des données personnelles de santé.
     
    Cette collaboration commence avec le personnel de santé dans les six mois de la prise en fonction. En effet, le personnel de santé est sensibilisé par rapport aux risques possibles. Cette sensibilisation peut prendre plusieurs formes comme une session de sensibilisation ou la diffusion d’une documentation didactique par exemple. De plus, pour rendre la protection des données optimale, un « rafraichissement »régulier est possible.
     
    Le respect des règles d’échange et de partage des données personnelles de santé fait également parti de ce contrôle. Ces règles sont posées part l’article L1110-4 du Code de la santé publique et du décret du 15 mai 2007. Selon ces règles, l’échange ou le partage d’information concernant un usager est autorisé entre les professionnels le prenant en charge (entre l’hôpital et le généraliste par exemple) dans l’intérêt de celui-ci. La restriction de l’accès des données personnelles de santé est renforcée par la limitation de l’accès aux données. En effet, seules les personnes participantes à la prise en charge sanitaire de l’usager sont autorisées à avoir accès aux données personnelles du patient. Cependant il existe une exception à ce principe. En effet, une liste de professionnels de santé dûment habilités à intervenir de façon exceptionnelle sur des données de santé en dehors de la prise en charge sanitaire de l’usager doit être élaborée.
    Ces règles permettent de diminuer les menaces envers les données personnelles de santé et également une meilleure organisation dans le service.
     
    Une protection optimale des données personnelles de santé durant la réalisation de la finalité poursuivie se termine enfin par le fait d’informer l’usager et de recueillir son consentement.
    En effet, l’usager doit être informé de plusieurs choses. Dans un premier temps il doit être informé de ces droits : droit à l’information, droit d’opposition, droit d’accès et droit de rectification. Dans un second temps l’usager doit être informé sur les conditions de partage et d’échange des données. Le fait d’informer l’usager permet d’éviter les risques d’échanges de données personnelles à un tiers non-autorisé. Après avoir prit connaissance des règles, l’usager doit donner son consentement. Le consentement de l’usager est nécessaire pour le service car à travers celui-ci l’usager devient également responsable de la protection de ses données personnelles de santé.
     
     Enfin, le contrôle a posteriori se pose avec les questions de conservation et de restitution des données personnelles de santé. L’objectif était ici de fixer une durée de conservation.
    Ainsi, deux principes ont été dégagés. Le premier principe évoque que les données personnelles de santé doivent être conservées  que pendant une durée cohérente avec la finalité du traitement. Le second principe évoque que la conservation doit respecter les durées indiquées par la loi lorsque celles-ci sont spécifiées. Ce contrôle a posteriori a pour finalité d’éviter que des données soient perdues ou qu’elles soient entre les mains de tiers non autorisés.
     
    Avec tous ces contrôles, la protection des données ne peut être que renforcée.
    En optimisant les contrôles, la dématérialisation des données personnelles de santé peut continuer à se développer en réduisant les menaces et les risques liés à ces données.
     
     
     


mardi 2 juin 2015

LE CABINET BISMUTH AUX UNIVERSITE D'ETE DE LA E SANTE

Le Cabinet BISMUTH sera présent les 1er, 2 et 3 juillet prochains aux Universités d'Eté de la E SANTE, à Castres,  pour animer un atelier consacré aux enjeux juridiques des objets connectés appliqués à la e-santé.


http://www.universite-esante.com/

LE CABINET BISMUTH poursuit le développement de son département SANTE PHARMACIE & BIOTECHNOLOGIES en AFRIQUE ...



Le Cabinet BISMUTH, installé à LYON et PARIS, marque désormais le développement de son activité sur le continent africain (Afrique du Nord, Afrique de l'Ouest et Afrique Centrale francophone).


Le Cabinet compte dores et déjà trois représentations sur le continent à NIAMEY, ABIDJAN et BAMAKO et poursuit activement sa politique d'implantation locale aux fins d'accompagner juridiquement le portage des activités de santé sur le continent.






LA RESILIATION POUR FAUTE DE LA CONVENTION DE TELERADIOLOGIE


L’article L 6316-1 du Code de la santé publique définie la télémédecine comme :

« une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l'information et de la communication. Elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d'autres professionnels apportant leurs soins au patient ».

Cet article, issu de la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoire du 21 juillet 2009, a fait l’objet d’un décret n° 2010-1229 du 19 octobre 2010 qui précise notamment quels actes relèvent de la télémédecine[1].

Le législateur a donc entrepris d’instaurer un cadre juridique pour permettre aux différents acteurs du secteur de la santé de développer le recours à la télémédecine. Certains établissements publics ont choisi de créer des Groupements de Coopération Sanitaire afin d’organiser et de mutualiser les activités de télémédecine sur un territoire donné. D’autres ont en revanche décidé de signer des conventions avec des professionnels libéraux pour assurer l’interprétation des actes radiographiques au sein de l’hôpital.

Ce système, plus contraignant car il peut nécessiter le recours à une procédure de mise en concurrence et de publicité, présente également un risque en cas de dégradation des relations contractuelles.

C’est dans ce cadre que la Cour Administrative de NANTES a eu à se prononcer sur la rupture unilatérale d’un acte d’engagement conclu entre un Centre Hospitalier et une SELARL de radiologie.

Le marché public de télémédecine : une opération risquée

Au terme d’une procédure de marché public, le Centre Hospitalier et la SELARL avait signé le 1er mars 2010 un acte d’engagement qui confiait à cette dernière l’interprétation des clichés radiographiques réalisés au sein de l’hôpital. Le 17 mars 2011, le Centre Hospitalier a décidé de résilier unilatéralement l’acte d’engagement passé avec la SELARL aux frais et risques de la SELARL. Le Centre Hospitalier reprochait à la clinique des manquements à ses obligations contractuelles.

La SELARL a formé un recours en excès de pouvoir pour obtenir l’annulation de la décision de résilier le contrat. Par un jugement en date du 8 mars 2012, le tribunal administratif d’Orléans rejette en partie la demande de la SELARL. Le juge affirme en effet que la décision de résiliation unilatérale du marché ne pouvait pas être fondée sur la faute de la SELARL mais dans l’intérêt général. Le tribunal a donc estimé que la SELARL n’avait pas commis une faute suffisamment grave permettant de justifier la résiliation unilatérale du contrat. En revanche, vu la dégradation des relations contractuelles entre les deux parties, la résiliation du contrat pouvait être prononcée. Cette décision ouvre un droit à indemnisation du préjudice lié au manque à gagner et aux pertes subies au profit de la SELARL.

Le Centre Hospitalier n’a pas fait appel de cette décision qui est devenue définitive. La SELARL a par la suite déposé une requête en référé expertise afin d’évaluer le préjudice qu’elle a subi. Le tribunal administratif d’Orléans a ordonné l’expertise par un jugement en date du 14 février 2013. C’est à ce titre que le centre hospitalier interjette appel de ce jugement et entend contester la définition de la mission  de l’expert et le préjudice contenue dans le rapport d’expertise.

Une rupture unilatérale aux risques et périls … du Centre Hospitalier.

Dans son arrêt d’appel en date du 31 décembre 2014, la Cour Administrative d’appel de NANTES va rejeter la demande du Centre Hospitalier en lui opposant d’une part le fait que l’expertise était déjà rendue, et d’autre part, que les fautes commises par la SELARL ne permettait pas de justifier la résiliation du marché pour faute.

La CAA de NANTES rejette les conclusions visant à requalifier les missions de l’expert puisque ce dernier a déjà rendu son rapport. Ce point ne nécessite pas d’être discuté tant il parait évident.

L’autorité administrative dispose du pouvoir de résilier unilatéralement un marché public, même en l’absence de faute du cocontractant[2]. L’exercice de ce droit suppose d’indemniser le cocontractant lésé par la décision. Toutefois, lorsque le fait générateur de la résiliation est la faute du cocontractant, le droit à indemnisation est réduit voir inversé[3]. Il faut néanmoins une faute d’une particulière gravité pour justifier le recours à la résiliation unilatérale d’un marché public. Le juge apprécie donc a posteriori si la faute du cocontractant permettait de justifier la décision de résilier le marché public.

En l’espèce, la Centre hospitalier reprochait à la SELARL de ne pas respecter les modalités de facturation en procédant à des surfacturations, d'avoir dépassé les délais d’interprétation contractuellement prévus, et de ne pas avoir identifié correctement l’auteur des comptes rendus d’interprétation.

La CAA de NANTES a jugé que les reproches qui étaient faits à la SELARL ne permettaient pas de justifier la décision de résiliation unilatérale pour faute. Elle a ainsi estimé que le non-respect des modalités d’organisation et la surfacturation ne sont que des fautes mineures.

En revanche, elle écarte le manquement lié à l’absence d’identification de l’auteur des comptes rendus pour absence de preuve. Il aurait été intéressant de voir si un manquement aux règles prescrites par le Code de la santé publique aurait permis de justifier la résiliation unilatérale. A notre sens, ce manquement n’a pas entrainé de préjudice grave pour le centre hospitalier ou pour les patients. Le degré de gravité de la faute n’aurait donc probablement pas été suffisant pour la Cour Administrative d’appel. Il aurait pu en être autrement si l’identification du patient avait été négligée car cela aurait pu entrainer des complications importantes pour les patients du centre hospitalier.

Le risque pour un établissement public hospitalier de s’engager dans un marché public avec une personne privée

La conclusion d’un contrat de marché public entre un établissement public hospitalier et un opérateur privé pour exploiter une convention de télémédecine présente un risque important notamment en cas de résiliation unilatérale du contrat. De tels risques peuvent être minimisés en instaurant des clauses au sein du contrat de marché public. Toutefois, la rédaction de ces clauses est un exercice difficile auquel il faut particulièrement prêter attention, le juge ayant le pouvoir de les annuler.



[1] Décret n° 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif à la télémédecine 
[2] Conseil d’Etat Ass2 mai 1958Distillerie de Magnac-Laval, Lebon 246.
[3] Conseil d’Etat, 29 mai 1981, SA Roussey, n° 12315

MSSanté : UN SYSTEME DE SECURISATION DES MESSAGERIES DES ETABLISSEMENTS DE SANTE BIENVENU ...


La E-santé est en marche. C’est ainsi que pourrait être résumée la folle épopée de l’E-santé qui n’en est pourtant qu’à ses premiers pas. Hôpital numérique, système d’information, santé mobile, digital health, hébergeurs de données de santé … Autant de « révolutions » qui sont apparues récemment et qui entendent moderniser la santé dans toutes ses formes. L’Etat encourage d’ailleurs très fortement le développement de la santé connectée notamment au travers de la stratégie nationale de santé ou du programme hôpital numérique.

Le Dossier Médical Personnel fait désormais pâle figure face à cet engouement pour la santé connectée, lui qui n’a jamais vraiment réussi à emballer les foules. Les pouvoirs publics avaient pourtant insisté sur sa mise en place et sur l’importance de pouvoir échanger des informations entre professionnels de santé.

Il reste malgré tout d’actualité et les pouvoirs publics entendent bien encourager son développement. C’est entre autre l’un des objectifs de la circulaire du 23 décembre 2014 relative à l’usage de la messagerie sécurisée MSSanté dans les établissements de santé[1].

La volonté des pouvoirs publics de favoriser le développement des systèmes d’information va de pair avec la mise en place d’outils sécurisés d’échange de données dématérialisées. Cette circulaire impose donc aux établissements de santé de rendre leur messagerie compatible avec le système MSSanté.

Ce système de messagerie sécurisée a été développé en collaboration avec l’ensemble des ordres professionnels afin de sécuriser et de simplifier les échanges entre professionnels de santé. Il été en phase de test en 2013 dans plusieurs établissements de santé. En juin 2014, ce système a été lancé officiellement et il est désormais accessible à tous les établissements de santé.

La circulaire entend généraliser le fonctionnement du système MSSanté et impose aux établissements de santé d’avoir fait évoluer leur service de messagerie avant la fin 2015. Elle indique à ce sujet qu’une période de trois à quatre mois a été nécessaire aux établissements pilotes pour pouvoirs envoyer les premiers messages. Une phase qui peut paraitre longue mais qui s’explique logiquement dès lors que l’établissement qui souhaite mettre son système de messagerie en conformité avec le MSSanté doit d’abord signer un contrat d’opérateur avec l’ASIP santé. Il pourra ensuite mettre son système en conformité avec le dossier de spécifications fonctionnelles et techniques (DSFT).

Afin de pouvoir échanger des données de santé, il apparaissait indispensable que la CNIL autorise un tel système, ce qui aurait pu compliquer encore un peu plus la mise en place et le fonctionnement du système. L’ASIP santé et la CNIL ont donc élaboré un système d’autorisation unique permettant à chaque établissement de simplement faire une demande d’autorisation pour pouvoir échanger des données.



[1] INSTRUCTION N° DGOS/PF5/2014/361 du 23 décembre 2014 relative à l’usage de la messagerie sécurisée MSSanté dans les établissements de santé, NOR : AFSH1431019J.

COMMENT PANSER L'INTERDICTION GENERALE DE LA PUBBLICITE POUR LES PROFESSIONS LIBERALES ?


La médecine n’est pas un commerce. Elle ne peut donc pas s’exercer comme tel et c’est pourquoi la législation interdit aux professions médicales de faire tout type de publicité. Une évolution ne semble pas encore au gout du jour pour les professions médicales. Quoi que…

En application de l’article 19 du Code de déontologie médical, codifié à l’article R. 4127-19 du Code de la santé publique :

« Sont interdis tous procédés directs ou indirects de publicité ».

De tels procédés n’ont jamais fait l’objet d’une définition de la part du législateur ce qui laisse une grande marge d’appréciation en cas de poursuites disciplinaires.

Une directive communautaire du 10 septembre 1984 est venue apporter une définition générale de la publicité[1]. Ainsi, s’entend par publicité :

« toute forme de communication faite dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou de services, y compris les biens immeubles, les droits et les obligations ».

Combinée avec l’interdiction inscrite à l’article 19 du Code de déontologie médical, il faut comprendre que le médecin ne peut user de formes de communication, directe ou indirecte, lui permettant de promouvoir la fourniture des services médicaux qu’il rend.

La publicité doit donc être distinguée de la communication qui est autorisée pour les professionnels de santé. Cette dernière ne doit toutefois pas chercher à mettre en avant le praticien mais bien informer le public.

Dans son Commentaire du Code de déontologie médical, le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) donne quelques exemples permettant de caractériser les procédés directs et indirects de publicité[2].

Les tracts publicitaires, les annonces non motivées, les encarts publicitaires dans les journaux sont donc des procédés interdits selon le CNOM.

Comme bien souvent, quand on a dit ça, on a tout dit et rien dit, mais surtout rien dit…

C’est pourquoi, il est opportun de s’intéresser aux différentes décisions jurisprudentielles qui éclairent sur le champ d’application de l’interdiction de la publicité.

Le Conseil d’Etat a par exemple décidé dans un arrêt du 27 avril 2012 que le site internet d’un chirurgien-dentiste ne peut constituer un élément de publicité et de valorisation personnelle du praticien et de son cabinet sans porter atteinte à l’interdiction de la publicité[3]. En l’espèce, le chirurgien-dentiste avait mis en avant des opérations réalisées sur certains de ses patients et il recommandait des soins qu’il prodiguait. Ces informations excédaient les simples informations objectives, et la chambre disciplinaire n’a pas commis d’erreur de droit en estimant qu’il y avait un manquement déontologique.

Cette décision reflète une certaine constance dans la jurisprudence du Conseil d’Etat qui admet assez facilement la caractérisation du manquement déontologique pour violation de l’interdiction de la publicité.

C’était toutefois sans compter sur un arrêt du 21 janvier 2015 dans lequel le Conseil d’Etat a admis que

 « constitue un procédé publicitaire prohibé » au sens de l’article R. 4127-215 du Code de la santé publique « la mise à disposition du public, par un praticien ou sans que celui-ci ne s'y soit opposé, d'une information qui ne se limite pas à un contenu objectif et qui vise à promouvoir auprès de patients éventuels l'activité au titre de laquelle ce praticien est inscrit au tableau de l'ordre des chirurgiens-dentistes en France »[4].

Le Conseil ajoute également :

« Dans l'hypothèse où, eu égard à son contenu, cette information n'est pas destinée à de telles personnes, la circonstance qu'elle leur soit librement accessible, notamment lorsqu'elle figure sur un site internet, n'est pas, par elle-même, de nature à lui conférer le caractère d'une publicité prohibée ».

Le chirurgien-dentiste exerçait l’art dentaire à la fois en France et en Angleterre. Le site, bien qu’accessible en France, n’était pas « destiné » au public français et l’interdiction de la publicité ne pouvait donc pas s’appliquer.

Ce n’est pas vraiment une révolution, mais plutôt une évolution des concepts qui pose plusieurs interrogations.

Le Conseil d’Etat ne reconnait pas du tout le droit pour les professions médicales de faire de la publicité. Mais il semble créer une toute petite ouverture qui pourrait peut-être permettre une évolution de la législation française au regard du droit européen qui entend proscrire les interdictions totales.

A cet égard, il faut souligner l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne du 12 septembre 2013 qui  affirme que :

« l’application de manière non discriminatoire, à un professionnel de la médecine établi dans un autre État membre, de règles nationales ou régionales encadrant, au regard d’un critère relatif à l’éthique professionnelle, les conditions dans lesquelles un tel professionnel peut promouvoir ses activités dans le domaine concerné peut être justifiée par des considérations impérieuses d’intérêt général tenant à la santé publique et à la protection des consommateurs »[5].

Dans cet arrêt, la CJUE estime que la règlementation du Land Hesse qui interdit aux professions médicales la publicité contraire à l’éthique professionnelle n’est pas contraire à la libre prestation de service dès lors qu’elle est appliquée de manière non discriminatoire et qu’elle est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général tenant à la santé publique et à la protection des consommateurs.

La sanction prononcée sur ce fondement doit également être proportionnée.

Il apparait clairement ici que la législation française interdisant totalement la publicité aux professions médicales n’est pas conforme avec cette jurisprudence. Reste à savoir si l’arrêt du Conseil d’Etat du 21 janvier 2015 permettra de la faire évoluer.



[1] Directive 84/450/CEE du Conseil du 10 septembre 1984 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité trompeuse. 
[3] Conseil d’Etat, 4e et 5e sous-section, Anthony, n°348259
[4] Conseil d'État, 4ème / 5ème SSR, 21 janvier 2015, n°362761
[5] CJUE, 12 septembre 2013, Kostas Konstantinides, Affaire C-475/11.

N'EST PAS MEDECIN QUI VEUT ... OU LE NECESSAIRE EXERCICE DE LA MEDECINE


La médecine est un art. Toutefois, est-on véritablement artiste lorsque l’on n’exerce pas véritablement son art ?

 

Il n’est pas ici question de rentrer dans des considérations métaphysiques sur l’essence et la définition de l’artiste mais bien de déterminer dans quelles mesures un médecin diplômé qui ne pratique pas effectivement la médecine peut demander son inscription au tableau de l’ordre ?

 

C’est à cette question que le Conseil d’état s’est intéressé dans un arrêt en date du 03 avril 2015 (Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 03 avril 2015, n°373548).

 

Les faits soumis au Conseil d’état étaient assez simples. Un médecin diplômé en 1994 a demandé son inscription au tableau de l’ordre en 2013. Le Conseil régional ayant refusé son inscription, le médecin a saisi le conseil national de la même demande.

 

Le Conseil national de l’ordre des médecins a également confirmé le refus d’inscription du médecin au tableau de l’ordre en se fondant sur l’article L. 4112-1 du Code de la santé publique.

 

Cet article précise en son alinéa 3 que :

 

« Nul ne peut être inscrit sur ce tableau s'il ne remplit pas les conditions requises par le présent titre et notamment les conditions nécessaires de moralité, d'indépendance et de compétence ».

 

C’est donc sur le fondement de l’incompétence du médecin que le conseil national de l’ordre a refusé son inscription au tableau.

 

Le médecin a alors formé un pourvoi devant le Conseil d’état en affirmant que les dispositions du code de la santé publique n’impose pas d’autres compétences que celles relevant du diplôme de médecine. Il relève également que le code de la santé publique ne prévoit pas de durée de validité du diplôme, ni d’une obligation d’exercer pour conserver le titre de médecin.  Il assistait encore sur son implication dans le domaine médical et sa participation à de nombreux colloques et congrès spécialisés dans la médecine.

 

Le Conseil d’état confirme la décision du conseil national de l’ordre des médecins au motif que :

 

« pour établir si la condition de compétence exigée par cette disposition est satisfaite, il appartient aux instances compétentes de l'ordre des médecins d'apprécier notamment la pratique professionnelle du praticien ainsi que les efforts accomplis pour assurer la mise à jour de ses connaissances »

 

Ainsi, le Conseil d’état conclu en affirmant que le conseil national de l’ordre a estimé à juste titre que le médecin ne disposait pas des compétences suffisantes pour exercer la profession de médecin puisqu’il n’avait jamais pratiqué et qu’il n’avait jamais mis à jour ses connaissances professionnelles, les congrès et colloques ne pouvant tenir lieu de formation.

 

Le médecin sera donc tenu de se former de nouveau s’il veut pratiquer son art en procédant notamment à la mise à jour de ses connaissances.

 

Le diplôme de médecine ne confère donc aucun droit acquis à la pratique de la médecine et le médecin doit nécessairement conserver ses connaissances à jour pour exercer son art.

 

mardi 20 janvier 2015

Le « micmac » de la TVA en EHPAD

L’assujettissement d’un EHPAD fait souvent l’objet de débat notamment pour le secteur public qui souhaiterait parfois y être soumis. La question de l’application de la TVA refait donc surface de manière régulière.

De quelle manière les EHPAD sont-ils assujettis à la TVA ?

La tarification en EHPAD distingue selon trois tarifs différents : le tarif hébergement, le tarif dépendance, et le tarif soin. L’application de la TVA varie pour ces trois tarifs et en fonction de la nature de l’établissement concerné.

Ainsi, s’il s’agit d’un EHPAD privé à but lucratif :

-          Le tarif soins est exonéré de la TVA (Article 261, 4, 1° ter du CGI) ;
-          Le tarif de hébergement est soumis à un taux de TVA réduit ;
-          Le tarif dépendance est soumis à un taux de TVA réduit.

L’établissement peut récupérer la TVA sur les dépenses d’investissement et de fonctionnement en matière de dépendance et d'ébergement.

Le contentieux fiscal sur l’application de la TVA est particulièrement abondant. Deux arrêts récents ont permis de préciser les choses.

Tout d’abord, l’arrêt de la CJUE du 27 mars 2014, SARL Le Rayon d’Or, C-151/13, est venu préciser le droit à déduction de la TVA pour les EHPAD privés. Une SARL gérante d’un EHPAD estimait que les sommes reçues au titre du forfait de soins ne relevaient pas du champ d’application de la TVA et qu’elles ne devaient donc pas s’imputer sur le droit à déduction de la TVA.

L’EHPAD estimait que le forfait soins ne pouvait pas être mis en relation avec les soins effectivement réalisés dans l’établissement. Le forfait de soins ne serait donc pas la contrepartie de prestations à titre onéreux.

La CJUE n’a pas suivi la SARL sur ce point et affirme que la somme perçue au titre du forfait soins est bien la contrepartie des prestations de soins réalisées au sein de l’établissement et relève donc du champ d’application de la TVA. Il en résulte à ce titre une exonération de TVA qui doit être intégrée dans le calcul du dénominateur du droit à déduction de la TVA de l’établissement.

La situation pour les EHPAD publics est moins complexe dans l’ensemble puisqu’ils ne sont pas soumis à la TVA ou ne peuvent la récupérer.

Néanmoins, la question de l’assujettissement des EHPAD publics à la TVA ressurgie de manière récurrente. Les questions parlementaires demandant des précisions sur l’application de la TVA aux EHPAD publics sont nombreuses. Un amendement au PFLSS de 2015 demandant la rédaction d’un rapport sur la fiscalité applicable aux EHPAD publics avait d’ailleurs été déposé par un député et adopté par l’Assemblée Nationale en octobre 2014. Toutefois, le sénat a demandé la suppression de cet amendement et de l’article 53 Bis afin de ne pas retarder la prise de décision alors même que des travaux sur la tarification en EHPAD ont été lancés.

Pourquoi les EHPAD publics souhaitent-ils se voir appliquer la TVA ?

Certains EHPAD publics sont de droit soumis à la TVA en vertu des règles de la concurrence. Toutefois, d’autres EHPAD publics souhaitent être soumis à la TVA, notamment en cas d’investissement à venir.

Nombreux sont les cabinets de conseils qui préconisent aux EHPAD publics de choisir l’assujettissement à la TVA. Cet assujettissement leur permettrait de réaliser des bénéfices important et de réaliser des investissements. Il faut ici préconiser la prudence vis-à-vis de ces allégations qui semblent très souvent exagérées. En effet, si l’assujettissement à la TVA pour un EHPAD public peut avoir un avantage, les inconvénients sont nombreux :

-          Risque d’exclusion d’un groupement de coopération : l’assujettissement à la TVA d’un établissement du groupement présente le risque de voir l’ensemble du groupement assujetti à la TVA. Les groupements seront donc peu enclins à garder ou à faire entrer ce genre d’établissement ;
-          Perte du bénéfice du taux réduit de TVA pour les opérations d’investissements (dispositif de livraison à soi-même d’immeuble (article 257-7° du CGI) ;
-          Impact éventuel sur le financement public apporté aux établissements.


La prise en compte de ses risques est indispensable pour prendre une décision éclairée en matière de TVA. La prise de conseils auprès de la DGFIP est par ailleurs hautement recommandée avant de choisir l’assujettissement à la TVA.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS

L’accès aux données de santé : « régulé » ou « étranglé » ?

Le projet de loi de santé de la ministre des affaires sociales, de la santé et des femmes a définitivement du mal à passer.

Outre la colère des médecins vis-à-vis du tiers payant généralisé, le projet de loi de santé suscite l’inquiétude de l’institut des données de santé. Cet organisme est chargé de veiller à la qualité des systèmes d’informations et ainsi que de la mise à disposition de ces données à ses membres.

L’institut des données de santé (IDS) a publié le 7 janvier 2015 son rapport annuel d’activité pour l’année 2014. Dans ce rapport, l’IDS s’inquiète que le projet de loi de santé « s’éloigne sensiblement de certaines préconisations de la commission open data en santé ». Cette dernière avait fait plusieurs propositions dans son rapport remis au gouvernement le 9 juillet 2014. L’avant projet de loi, avant d’être soumis au Conseil d’Etat, avait alors subi des modifications de la part du gouvernement. Il a encore été remanié avant d’être présenté en conseil des ministres en octobre 2014.

Données de santé : vers une ouverture ?

L’ouverture des données de santé s’avère essentielle pour tout un ensemble d’acteurs aussi bien publics que privés. Aujourd’hui, demander l’accès aux données de santé c’est un peu le parcours du combattant. Il faut être armé de patience pour gagner la bataille et bénéficier de l’autorisation d’accès.

Et cela risque d’être pire encore demain. Ainsi, le projet de loi de santé prévoit d’introduire un Système National des Données de Santé (SNDS) qui centraliserait le PMSI et le SNIIRAM, deux des plus grosses bases de données en santé. Toutefois, les conditions d’accès à ce système de données seront draconiennes afin de préserver l’accès à un nombre trop important de données. Ces systèmes contiennent effectivement des données anonymisées mais qui présentent un fort risque de ré-identification.

Autrement dit, si la centralisation apporte un avantage technique, elle perd tout intérêt pour ceux à qui l’accès sera dorénavant fermé alors même qu’ils pouvaient travailler auparavant sur le PMSI (toujours avec une autorisation, bien entendu). Pour l’IDS, la création de ce fichier va non seulement maintenir le verrouillage du SNIIRAM, mais également paralyser l’accès au PMSI, notamment pour les personnes privées à but lucratif.

La question qui doit alors se poser est-celle de savoir si la création d’un fichier aussi gros est véritablement nécessaire ?

Le Député Gérard BAPT a organisé un colloque le 15 décembre dernier à l’Assemblée nationale autour de ce sujet.

La plupart des acteurs présents sont apparus inquiets du risque posé par la création d’un tel fichier.

Mais plus encore c’est l’absence de réelles évolutions sur l’accès aux données de santé dans le projet de loi qui agite les acteurs du secteur.


L’Assemblée Nationale risque d’être le terrain d’affrontements assez houleux autour du projet de loi de santé. Nous ne manquerons donc pas d’informer nos lecteurs des débats parlementaires et des évolutions qui en découleraient.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS

mercredi 14 janvier 2015

LA COOPERATION AU-DELA DU RUBICON ... ?

Delphine JAAFAR, Avocat associé du Cabinet BISMUTH AVOCATS, en charge du département SANTE, PHARMACIE et BIOTECHNOLOGIES, a animé une journée consacrée aux outils juridique en matière de coopératin sanitaire, sociale et médico-sociale à l'EHESP ce mercredi 7 janvier 2015:

- Une pêche commune dans les eaux du RUBICON: les outils de coopération dans le sanitaire et le médico-social
coopération conventionnelle (dont les CHT), coopération organique (association, GIE, GIP)

- Des courants et des contre-courants dans les eaux du RUBICON: GCS et GCSMS, convergences et divergences
une nage en eaux troubles dans le RUBICON: la "sanitarisation" des outils de coopération
la coopération perdue au fond du RUBICON ?

PETIT DEJEUNER DEBAT ORGANISE PAR LE CABINET BISMUTH DANS SES NOUVEAUX LOCAUX PARISIENS SUR LE PROJET DE LOI DE SANTE

Le CABINET BISMUTH a organisé le 13 janvier 2015 matin un petit déjeuner dans ses nouveaux locaux parisiens (7 rue de Madrid, 75 008 PARIS) en présence d’acteurs du monde de la santé (public/ privé / usagers) consacré au projet de loi de santé : 

SUCRE OU SANS SUCRE
Projet de loi de santé
Réflexions et perspectives : quels changements pour les acteurs et professionnels de santé ?

Un focus particulier a été réalisé sur le Titre II de la loi relatif à l’amélioration des parcours de santé, à la problématique de l’OPEN DATA et enfin aux innovations dites majeures du projet de loi.

De riches débats pour un projet de loi qui laisse cependant de nombreuses interrogations quant aux objectifs poursuivis et à sa mise en œuvre opérationnelle ...

Retrouvez le diaporama des interventions sur le site du Cabinet BISMUTH AVOCATS: www.bismuth.fr


Delphine JAAFAR

BISMUTH AVOCATS

L'uniformisation progressive des prescriptions médicales en EUROPE

Le Parlement européen et le Conseil ont une volonté frénétique d’unifier le droit applicable aux Etats membres. Le droit de la santé n’échappe pas à cette envie furieuse et c’est même une matière ou les pouvoirs publics s’en donnent à cœur joie.

En France, la transposition en droit interne des directives de l’Union Européenne ne fait pas toujours l’objet d’un enthousiasme débordant. Le gouvernement est plutôt enclin à faire trainer les choses en transposant les textes au dernier moment.

Ainsi, deux directives datant du 9 mars 2011 (Directive 2011/24/UE) et du 20 décembre 2012 (Directive 2012/52/UE) ont harmonisé la législation applicable aux prescriptions médicales. L’objectif était de favoriser la reconnaissance des prescriptions médicales établies sur le territoire de l’Union européenne. Le droit français a transposé ces directives par une loi n° 2014-201 datant du 24 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé.

Dès lors, le travailleur allemand qui se fait prescrire du Xanax par un médecin Roumain en Italie peut aller chercher son médicament dans une pharmacie française.

Une telle harmonisation peut sembler superflu, mais les difficultés liées à l’obtention de prescriptions faites dans un autre Etat membre sont réelles et peuvent avoir des conséquences importantes.

Le décret du 17 décembre 2014, relatif à la reconnaissance des prescriptions de dispositifs médicaux établies dans un autre Etat membre de l’Union européenne apporte des précisions quant à la reconnaissance des prescriptions de dispositifs médicaux.

Les dispositifs médicaux sont définis comme un instrument, appareil, équipement ou encore un logiciel destiné, par son fabricant, à être utilisé chez l’homme à des fins, notamment, de diagnostic, de prévention, de contrôle, de traitement, d’atténuation d’une maladie ou d’une blessure.

Autrement dit, les dispositifs médicaux sont très nombreux et ils sont utilisés chaque jour pour prévenir ou soigner la maladie.

Ce décret modifie les articles R5211-70 et R5211-71 du Code de la santé publique. Désormais, lorsque les prescriptions médicales respectent les mentions obligatoires prévues à l’article R5211-70, les personnes habilitées à délivrer les dispositifs médicaux ne peuvent refuser de délivrer ces produits, sauf en cas de doutes légitimes et justifiés.

Voilà que s’ouvre un peu plus le marché des dispositifs médicaux en Europe alors même que la France et l’ANSM entendent modifier le régime applicable aux dispositifs médicaux.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS


Le virage ambulatoire: seule manière d'éviter de se prendre le mur ?

« Le deuxième axe est le virage ambulatoire qui sera opéré dans les établissements hospitaliers ».

La Loi de finance de la sécurité sociale pour 2015 adoptée le 22 décembre 2014 pour 2015 de multiplier le recours aux solutions ambulatoires.

C’est ainsi que dans le II de l’annexe B présentant un RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES, PAR BRANCHE, DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DU RÉGIME GÉNÉRAL DE SÉCURITÉ SOCIALE, LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET DE DÉPENSES DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DE CES RÉGIMES AINSI QUE L'OBJECTIF NATIONAL DE DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE POUR LES QUATRE ANNÉES À VENIR, la loi annonce « une transformation fondamentale du fonctionnement du système hospitalier ».

Que faut-il penser de ce virage déjà annoncé dans le projet préparant la loi de finance ?

Le développement de la médecine ambulatoire n’est pas une volonté nouvelle du gouvernement. Ainsi, plusieurs rapports mettant en exergue les nombreux avantages apporter par ce mode de prise en charge, ont été publiés ces dernières années, voir ces derniers mois.

Ces rapports montrent pour la plupart que le recours à la médecine et à la chirurgie ambulatoire est insuffisant en France. Par exemple, un rapport de la HAS et de l’ANAP intitulé « ensemble pour le développement de la chirurgie ambulatoire » (titre un brin racoleur tout de même) indique que seulement 4 opérations chirurgicales sur 10 sont effectuées en ambulatoire contre 8 sur 10 aux Etats-Unis.

Marisole Touraine, Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes est largement favorable au développement de la médecine et de la chirurgie ambulatoire. Elle fixe une objectif de 50% des opérations réalisées en ambulatoire dès 2016.

Pourquoi cet engouement frénétique pour la chirurgie et la médecine ambulatoire ?

L’atout majeur de la chirurgie ambulatoire n’est pas d’améliorer les soins apportés au malade mais bien de réduire les dépenses de santé et de rendre plus efficace la dépense hospitalière. En effet, le principe de la chirurgie ambulatoire est de réduire la présence du patient à l’hôpital et ainsi de réduire les coûts liés à son hébergement et à sa surveillance postopératoire. Plusieurs dizaines de millions d’euros pourraient ainsi être économisés par le secteur hospitalier.

Néanmoins, le recours massif à la chirurgie ambulatoire présente un risque : celui de voir des services hospitaliers désorganisés par des exigences et un suivi nouveau.

Le développement ambulatoire ne saurait se faire sans que soit préalablement mis en place les outils nécessaires pour gérer le flux de patients fraîchement débarqués des salles d’opération.

Et ce n’est pas les secrétaires administratifs que sont en train de devenir les médecins généralistes qui pourront assurer une telle charge de travail. C’est pourquoi la loi entend instaurer un contrat de praticien territorial de médecine ambulatoire.

Reste à voir dans quelles conditions ce médecin libéral pourra assurer sa nouvelle mission.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS


Un lancement retardé pour la facturation individuelle

L’article L.162-22-6 du Code de la sécurité sociale prévoit qu’un décret en Conseil d’Etat fixe les catégories de prestations qui sont soumises à la facturation individuelle.

Ce décret vient d’être publié au JORF le 3 janvier 2015. Il détermine les modalités de généralisation de la facturation individuelle applicable aux établissements publics et privés de santé mentionnés aux a, b et c de l’article L.162-22-6.

La facturation individuelle des établissements de santé (FIDES) est un projet destiné à instaurer progressive la facturation individuelle au sein de l’ensemble des établissements de santé public et privé à but non lucratif. Ce projet, initié en 2010, à fait l’objet d’une longue expérimentation afin d’évaluer les avantages d’une telle facturation et les conditions dans lesquelles une généralisation pourrait intervenir.

En pratique, la facturation individuelle permet aux établissements concernés d’adresser directement une facture à l’assurance maladie pour chaque épisode de soins.

Les objectifs du FIDES sont clairs :

-          Meilleure maîtrise des dépenses de santé;
-   Informer l’Etat sur les données individuelles des établissements afin d’en améliorer le fonctionnement et la gestion;
-          Remboursement plus rapide des assurés sociaux.

En 2013, le calendrier prévoyait la généralisation progressive du FIDES jusqu’à son terme en 2016. Ce décret marque le point de départ de cette généralisation du financement et prend actes des expérimentations réalisées dans les établissements.

Il fixe les modalités de généralisation de la facturation des établissements de santé, ainsi que les conditions dans lesquels ils doivent traiter les données personnelles de santé.

L’entrée en vigueur de ce décret est retardé jusqu’au 1er mars 2016 mais il permet d’apprécier la teneur des obligations qui pèseront sur les établissements de santé.

La généralisation de la FIDES nécessite des investissements important de la part des établissements concernés. En effet, ils doivent disposer d’une solution de dématérialisation pour la facturation ce qui entraine des coûts de formation important du personnel.

La mise en place d’un comité de pilotage réunissant les acteurs des différents services en lien avec la facturation apparait indispensable afin de réaliser une transition optimale vers la facturation individuelle.


Ce n’est donc pas aujourd’hui encore que la facturation des établissements sera unifiée.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS

Le GHT: une CHT bis ?

Le Groupement hospitalier de territoire (GHT) est le nouveau vaisseau amiral créé par le gouvernement afin de réaliser une véritable coopération hospitalière efficace et dynamique. Intégré dans le projet de loi de santé de Madame la Ministre Marisol Touraine, le GHT vise à « ancrer l’hôpital dans son territoire » et à « renforcer le dispositif de coopération hospitalière ». Toutefois, ce navire amiral semble déjà avoir du plomb dans l’aile tant les critiques et les interrogations sur son mode de fonctionnement sont nombreuses.

Cet outil est destiné à remplacer les Communautés Hospitalières de Territoire (CHT) créées par la loi HPST du 21 juillet 2009 qui ont-elles aussi souffert les critiques des professionnels de santé. Trop lourde, trop complexe à mettre en œuvre et pour des résultats insuffisants. Le GHT devra donc être capable de corriger ces travers tout en restant efficace.

Pour ce faire, le projet de loi envisage plusieurs innovations destinées à faire évoluer la coopération hospitalière.

L’adhésion au GHT sera obligatoire pour tous les établissements publics de santé d’ici le 1er janvier 2016. Il s’agit là d’un calendrier très ambitieux qui apparait difficilement tenable, la loi n’étant encore qu’au stade du projet.
Selon le député Jean Leonetti, instaurer une telle obligation d’adhésion aux établissements de santé est indispensable pour permettre à « notre système hospitalier de se recomposer rapidement et de passer outre les inévitables réticences locales ». C’est donc à fin de redynamiser et de renforcer la coopération hospitalière que l’adhésion aux GHT est rendue obligatoire.
Il existera des dérogations fondées sur la spécificité de l’établissement lui permettant ainsi de ne pas adhérer à ce groupement. Toutefois, pour ceux qui refuseraient d’y adhérer, ils se verraient privés de dotations de financement de l’aide à la contractualisation. Cela aurait nécessairement un impact sur le fonctionnement des établissements.

Le projet de loi prévoit également d’ouvrir la coopération aux établissements et services médico-sociaux publics. Les établissements privés de santé pourront également intégrer le groupement en tant que partenaire.
L’objectif est donc clair : il faut ouvrir la coopération afin de simplifier et d’optimiser le parcours de soin du patient. Toutefois, rien ne précise les avantages et inconvénients d’un tel partenariat pour les établissements médico-sociaux et privés. Au regard des différences de fonctionnements de toutes ces entités, l’unification sous un même groupement semble peu réalisable. Pourtant, les expériences réussies de coopération entre ces différents types d’établissements prouvent qu’une collaboration est possible, voir indispensable pour assurer une stratégie médicale commune.

Le renforcement de la coopération entre établissement suppose de diminuer les coûts liés à l’exploitation des établissements. C’est pourquoi, le groupement devra charger un établissement de remplir les fonctions supports pour tout le GHT. Ce dernier devra gérer le système d’information hospitalier et le département de l’information médicale unique pour l’ensemble du groupement, la politique d’achats, la coordination de la formation. Ainsi, la coopération « forcée » pourrait se traduire par une réduction des frais fixes de fonctionnement et permettent d’économiser notamment en mutualisant les services et en globalisant les achats des établissements au niveau du groupe.

Toutefois cela suppose une entente et une organisation parfaite de tous les membres du GHT. Une telle concertation entre les établissements du groupe apparait toutefois compromise lorsqu’aucune gouvernance n’est prévue par le projet de loi. En effet, il est laissé aux établissements le soin d’organiser le fonctionnement du groupement. De plus, s’il est précisé que les GHT n’ont pas la personnalité morale, le projet de loi n’indique pas quelle sera la place des  membres du GHT. En effet, si l’article L 6132-1 –I révèle bien que le GHT ne bénéficiera pas de la personnalité morale, cela interroge sur la nature de cette entité juridique.

Est-ce une autre forme de coopération conventionnelle telle que le prévoyait la CHT ou une forme « sui generis » qui s’imposerait aux établissements ?

Les inquiétudes qui entourent le projet des GHT sont nombreuses, notamment au regard du délai très court qui est imposé par le projet de loi.

Mathieu GAUTIER
BISMUTH AVOCATS